L’histoire du chantier Bénéteau

Le chantier Bénéteau fait, incontestablement, partie de l’histoire de la plaisance en France et dans le Monde. Mais son histoire n’a pas été un long fleuve tranquille. La famille Bénéteau, et leurs équipes, ont traversé de nombreuses tempêtes, avant de devenir un leader mondial.

Tout le monde connaît le First 30, le Baroudeur ou la gamme Oceanis. Ces voiliers font partie de notre environnement, et de notre culture maritime. Il n’y a, sans doute, pas un seul port ou mouillage en France, ou vous ne croiserez pas un voilier du chantier Bénéteau. Aujourd’hui, numéro 2 mondial, derrière l’américain Brunswick, le chantier de saint-Gilles Croix de Vie est un des grands noms de la plaisance dans le monde. Le groupe dispose, aujourd’hui, d’unité de production aux quatre coins du monde et est propriétaire de nombreuses marques comme Jeanneau ou Lagoon.

Mais avant d’en arriver à cette situation de leader mondial, le chantier a connu une histoire mouvementée et aurait, d’ailleurs, put disparaître avant même de produire son premier voilier de plaisance.

1984, création du chantier Bénéteau

L’histoire du chantier Bénéteau commence en 1884. Benjamin André décide de créer un chantier naval. Il commence par construire des chalutiers à voiles. Ces bateaux, pensés pour les artisans pêcheurs, connaissent rapidement le succès. En 1912, c’est le premier virage. Le chantier vendéen construit ses premiers chalutiers à moteur. Pendant toute cette période, Benjamin Bénéteau mène sa barque avec succès. Les ventes sont là et la réputation du chantier est excellente.

Mais les années d’après-guerre son compliquées. En 1929, le fils de Benjamin, André, reprend la barre du chantier, seul, après la disparition de ses parents. Les premières années sont dures pour le jeune entrepreneur, mais après quelques difficultés, de nouvelles commandes arrivent et le chantier redémarre.

La Seconde Guerre Mondiale réduira, à nouveau, l’activité du chantier. Mais après la guerre, la flotte de pêche française a presque disparue. Il faut reconstruire des chalutiers. Le chantier Bénéteau participera à ce grand défi. Et André Bénéteau fera preuve d’un grand sens de l’innovation qui permettra d’obtenir la confiance des professionnels.

Du risque de faillite à la renaissance,en 1964

logo Bénéteau

Cependant, la reprise est de courte durée. La pêche artisanale commence à disparaître, en France. Les bateaux usines remplacent les flottes de thoniers, sardiniers et autres chalutiers. Les commandes se font de plus en plus rares, et le chantier en très grande difficulté.

Mais pourtant, la famille Bénéteau ne baisse pas les bras. Le cœur du chantier est dans la pêche, mais la famille va s’adapter. En 1964, les enfants d’André reprennent le chantier, à leur tour. André, père et fils, savent dessiner des bateaux, et Annette, la fille, est une visionnaire et une femme d’affaire. Dans le même temps, celle-ci s’est mariée avec un homme doté d’un sens commercial qui va grandement aider le chantier. Il s’agit de François ROUX, qui sera, lui aussi de l’aventure, jusqu’à sa mort, en 1989.

petits canots Bénéteau

En effet, dans les années 60, la construction navale connaît une révolution appelée « le polyester ». Mais la famille Bénéteau ne s’intéresse pas encore à la plaisance. Le chantier imagine plutôt la construction de petits canots de pêches en plastique. Et c’est un succès immédiat. Et celui-ci va dépasser les espérances du chantier, il ira bien au-delà des professionnels. En fait, de nombreux particuliers vont s’intéresser à ces petits canots, à voile. Des petits voiliers parfait pour naviguer tranquillement le long des côtes et aller pêcher. En fait Bénéteau vient de créer un nouveau marché : Le Pêche-promenade. C’est comme cela que naissent le Flétan et autres Ombrines.

Viendront ensuite les Galions, Forbans et autres Baroudeurs, encore très présents, 50 ans plus tard, dans nos ports.

1972, l’Évasion vers le pêche promenade en série

1972 marque une transition. C’est l’année ou le groupe redevient réellement serein financièrement et commercialement. Il est alors temps d’investir. C’est donc le début des unités de la production industrielle. Le chantier se fait, petit à petit, une place dans les salons nautiques. Mais leur positionnement pêche promenade, n’inquiète pas des fabricants comme Mallard, Quere et autres.

Pourtant, la nouvelle gamme de voilier proposée par Bénéteau est redoutablement efficace, commercialement parlant. Il s’agit de la gamme Évasion. Souvent moqués par certains voileux, ces fifty’s n’ont jamais été remplacés et connaissent un succès important. Les Évasion 22, 28, 32 et autres restent encore très recherchés. Et leur cote, sur le marché de l’occasion, en fait crier certains.

Ces voiliers sont tous dessinés par André Bénéteau, fils. Il est sans doute le meilleur pour dessiner ce type de bateau.

1976, la naissance du Bénéteau First 30

beneteau-first-30
photo brochure beneteau

Mais justement, la famille Bénéteau, et surtout Annette, regardent de plus en plus vers la voile plaisir, et ces voiliers plus rapides. Le marché est en plein boom et les leaders du moment sont en pleine croissance. Il y a donc des places à prendre.

Le chantier Bénéteau va alors profiter d’une opportunité. C’est sous l’impulsion de François Roux, et Annette, que le chantier va élargir sa gamme. André Mauric, un architecte reconnu, a dessiné un Half Tonner a succès : L’Impensable. Cet architecte est le père du Super Arlequin et Super Challenger. Il sait donc dessiner des voiliers à succès. Les moules de l’Impensable appartiennent au chantier Quéré, mais ce dernier décide de les vendre. Les Vendéens vont alors profiter de l’occasion pour racheter ces moules, redessiner le roof et la quille, afin de le transformer en course-croisière plus grand public. Le bateau sera présenté au salon de Paris et le succès est immédiat et historique. Le premier First de l’histoire du chantier, le First 30, est né. Rapidement, le bateau devient la série officielle pour le Tour de France à la Voile et le succès commercial est là.

La famille Bénéteau ne perdra pas de temps pour lancer cette nouvelle gamme. Mais, pour cela, il faut faire appel à des gens de l’extérieur. Et c’est le début de la coopération entre de nombreux architectes de talents et le chantier Bénéteau.

Les années 80, et le développement de la gamme First

gamme First Bénéteau

Les années 80 marquent le succès commercial et industriel du chantier Bénéteau. Les leaders d’hier sont dépassés, un par un, grâce à des voiliers répondant à une demande large : Des voiliers populaires, simples, marins et rapides. La gamme First va connaître un succès incroyable. Après un semi-échec, avec le First 27 dessiné par André Mauric, le chantier se tourne vers des architectes comme Jean Marie Finot. Celui-ci signe des voiliers à succès comme :

  • Le First 18, produit à 1000 exemplaires
  • Le First 22, sorti en 1978 et produit à 750 exemplaires
  • Le First 25, produit à 1115 exemplaires
  • Le First 29, produit à 520 exemplaires, de 1983 à 1989.

Le chantier se tournera aussi vers les architectes Jean Berret et Olivier Racoupeau pour dessiner des voiliers comme :

  • Le First 38, produit à 250 exemplaires
  • Le First 305, produit à 640 exemplaires
  • Le First 32s5, produit à 280 exemplaires
  • Le First 32, produit à 500 exemplaires
  • Le First 35, produit à 400 exemplaires

Le chantier saura même se tourner vers l’étranger en faisant appel à German Frers pour dessiner le First 42.

Rien que tous ces noms de bateaux vous donnent une idée du succès incroyable du chantier qui devient alors numéro 1 mondiale. Bénéteau sera côté en bourse, en 1984, pour son centenaire. Cette même année, le groupe commence à produire aux USA. Le chantier, enfin, se fait un nom en régate avec des prototypes comme le First lady ou le First Evolution ou des séries comme le First Class 8.

La naissance de la gamme Bénéteau Oceanis

logo bénéteau

Durant cette décennie, le chantier lance aussi une nouvelle gamme, plus orientée croisière. L’origine de cette gamme vient d’une réflexion autour des voiliers Idylles, imaginées avec des loueurs comme Moorings.

L’idée est de proposer une gamme de voiliers sages, pensés pour la croisière et le confort en mer, comme au port. C’est la naissance de la gamme Oceanis. C’est l’architecte Philippe Briand qui est en charge de ces premiers voiliers. Le chantier propose, pour commencer, deux voiliers : les Oceanis 430 et 350. le succès sera lui aussi très rapide. Viendront ensuite les Oceanis 320 et 390, d’excellents voiliers.

1989, l’année du Figaro Bénéteau

1989 est encore une date importante pour le chantier. C’est l’année de naissance du célèbre monotype de régate et course au large : Le Bénéteau Figaro. A cette époque, les organiseurs de la Course du Figaro, anciennement course de l’Aurore, lancent un appel à projet pour la production d’un monotype. C’est le projet proposé par Bénéteau et l’architecte Jean Marie Finot qui remporte le projet.

Ce nouveau monotype est aujourd’hui entré dans l’histoire de la course au large. Il a participé au développement de la course au large et de la voile à l’étranger.

Les années 90 et le passage de la crise

Au début des années 90, nombre de chantiers qui ont accompagné les débuts de la plaisance ont disparu. Je pense aux chantiers Mallard, Edel, Quéré ou encore CNSO. Mais la crise des années 90 va encore faire mal à de nombreux chantiers comme Gib Sea ou Dufour. C’est alors, pour Bénéteau, le moment de se transformer et de consolider sa place, parmi les leaders mondiaux.

Le chantier profite de cette décennie pour se développer en investissant dans ses unités de production et en rachetant différents chantiers :

  • 1992 : rachat de CNB (revendu depuis)
  • 1994 : Lancement de la construction de Mobil’Home
  • 1995 : Rachat du chantier Jeanneau, Lagoon et des voitures sans permis Microcar
  • 1997 : Rachat du chantier Wauquiez ( revendu depuis)
  • 1999 : Création des filiales EYB ( vente de bateaux) et SGB finance ( financement)

Du côté de la production, le chantier développe très fortement ses gammes Oceanis et First. Le chantier développe sa production de voiliers de plus de 10 mètres, au dépend des plus petits voiliers, moins rentables. Un des grands succès de l’époque est L’Oceanis 411, produit à plus de 1400 exemplaires.

Au milieu des années 90, le chantier lance une gamme très intéressante : la gamme Spirit. Les First 300, First 210 et First 260, reviennent aux fondamentaux de la voile. Mais la gamme Oceanis n’est pas laissée de côté, avec le célèbre Océanis 411, par exemple.

Et aujourd’hui ?

Béneteau Oceanis

Le Groupe Bénéteau est le numéro 2 mondiale. Ces dernières années, le chantier s’est fortement développé dans le bateau de luxe, avec les voiliers Bordeaux, mais aussi dans les trawlers et bateaux à moteurs Prestige.

Le groupe doit faire vivre de nombreuse marques dont, achetées récemment : Four Winns, Glastron, Wellcraft et Scarab.

Le chantier s’est définitivement écarté des petits voiliers. Si Bénéteau a bien redécouvert les dayboats, c’est en rachetant les voiliers Seascape. Renommés First SE, ils font le plaisir des mangeurs d’écoutes. Mais pour la petite croisière de moins de 10 mètres, il ne reste plus que l’Oceanis30.1, très bien pensé d’ailleurs.

La gamme Oceanis est devenue leader sur son segment des croiseurs de plus de 10 mètres. Le groupe a résisté aux attaques commerciales de marques comme Hanse ou Bavaria. C’est d’ailleurs cette gamme qui est priorisée, avec les Oceanis 34.1, 38.1 et autres.

5 réflexions au sujet de “L’histoire du chantier Bénéteau”

  1. Bonjour Ronan et grand merci pour cet article.
    Je n’ai eu comme Voiliers que des « Bénéteau » et en ai toujours été satisfait car chacun correspondait à mes programmes de navigation.
    Mais j’ai eu la chance aussi de connaître François CHALAIN entre 1986 et 1989 ayant un Evasion 29 à St Gille croix de vie, c’était la « cheville ouvrière » du Chantier Bénéteau sur le plan technique. Il a énormément contribué à faiure évoluer les FIRST en particulier
    Il est malheureusement parti trop tôt à 61 ans d’un cancer
    J’ai regretté que vous n’ayez pas eu un mot pour lui dans votre article.
    Sur nun plan plus drôle j’ai failli acheté l’YDILLE 10,50 d’André BENETEAU en 1988 qui s’appelait « le rayon vert » et je lui ai demandé pourquoi ce nom ?
    Le punch des antilles m’a aidé à avoir la réponse.
    Cordialement
    JP BROSSAULT

    • Bonjour,
      Merci pour ces précieux compléments. Je suis content que tu évoques le nom de François Chalain, que je connaissais pas. Tu viens rectifier cet oubli. Merci à toi. je ferai, sans doute, une mise à jour de l’article du coup.

  2. Merci Ronan ainsi que les commentateurs avisés, depuis la création du site, La Normandie, régulièrement, s’évade et respire à plein poumons l’air marin. J’ai eu de belles unités, mais, maintenant trop âgé, avec ma compagne nous nous contentons d’un California transportable.

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