L’histoire du chantier Kelt et des ses voiliers

Le chantier Kelt marine a été un des principaux constructeurs de voiliers français, entre la fin des années 70 et le début des années 80. Retour sur l’histoire d’un chantier breton qui a proposé plusieurs voiliers qui ont fait référence.

Il y a des chantiers qui restent dans la mémoire des plaisanciers. Je dirais même que des chantiers restent dans la mémoire collective locale. Parlez du chantier Kelt à des morbihannais, surtout des vannetais, ils connaissent tous le nom. Même ceux qui ne connaissent pas les bateaux.

Et c’est vrai que ce chantier a connu une sacrée histoire, entre sa création par un skipper reconnu et sa disparition, après un incendie, puis sa reprise avant la fin définitive de l’usine. Kelt Marine a été un des grands constructeurs de voiliers français. Il a produit plusieurs milliers de voiliers, dont des références et des voiliers reconnus et toujours appréciés. Mais retournons aux années 70 pour bien comprendre cette histoire.

Gilles Le baud, de la régate à l’industrie

Tout commence avec un homme, Gilles Le Baud. Gilles Le Baud est né à Paris, en 1948. Mais d’origine bretonne, il passe toutes ses vacances dans la baie de Quiberon. Après quelques années en école de voile, la famille achète un Corsaire puis un Muscadet. C’est le début d’une passion pour la course au large. Puis les premiers podiumS arrivent sur le circuit RORC. Le jeune homme, malgré des études en école de commerce met alors le cap sur la régate et la course au large. Il devient un des meilleurs skippers des années 70. En 1973, il remporte la course de l’Aurore ( ancêtre de la course du Figaro). Il s’installe dans le Morbihan, près de Vannes.

Mais ce skipper a aussi un tempérament d’entrepreneur. Il décide, en 1974, de se consacrer à un chantier naval pour construire des voiliers. Ce sera la naissance de Kelt Marine. Kelt, comme Celte.

Gilles Le Baud continuera d’être présent dans la course et la régate en gagnant une nouvelle fois la course de l’Aurore en 1978, plus plusieurs régates. Mais il sera surtout à l’origine, avec d’autres, du Spi Ouest France. Gilles Le Baud devient alors une figure incontournable de la voile, (régate et construction navale) en France, et à l’international.

La naissance des voiliers Kelt

Mais revenons en au chantier Kelt. C’est donc en 1974 que Gilles Le baud crée son chantier. Le chantier sera situé à Vannes, dans le Golfe du Morbihan.

Le premier voilier à sortir du chantier sera le Kelt 6.20. Ce petit voilier est à l’image de la philosophie du chantier : Proposer des voiliers populaires, simples à naviguer pour découvrir nos côtes, voire plus. Pour ce premier voilier, le chantier fait appel à Philippe Harlé, un des grands architectes de bateaux. Ce dernier aura pour mission de dessiner un petit voilier, dans l’esprit du Muscadet, mais plus moderne. Le Kelt 6.20 sera le premier succès de Gilles Le Baud avec plus de 1300 bateaux produits, de 1974 à 1984. Le bateau est plébiscité pour sa simplicité et ses qualités marines.

3 ans plus tard, le chantier se lance dans la production d’un voilier plus grand, le Kelt 8m, dessiné par Gilles Ollier connaît, lui aussi, le succès avec 400 exemplaires vendus.

En 1978, le chantier va surfer sur la création de la classe Micro pour proposer sa propre série. Le Kelt 5.50 arrive alors en catalogue, dessiné, lui aussi, par Gilles Ollier. Résultat : 600 exemplaires vendus d’un voilier considéré comme un des meilleurs voiliers de la classe Micro.

En 1980, les attendus des plaisanciers changent. Les voiliers deviennent plus croiseurs que voiliers de régate. Le chantier doit s’adapter, et c’est ce qu’il fait avec brio.

L’âge d’or de Kelt Marine

equipement de sécurité sur kelt 7.60

Avec ces 3 premiers voiliers, le chantier breton est maintenant bien installé dans le paysage français. Il emploie plus d’une centaine de salariés. Il fait partie des acteurs importants comme Kirié, Mallard, Yachting France ou Gib Sea, certes derrière les leaders Bénéteau ou Jeanneau. Mais comme nous le savons tous, les années 80 vont être décisives pour nombre de chantier. Il faut s’adapter. Et Gilles Le Baud l’a parfaitement compris. Il va donc chercher à renouveler sa gamme de voiliers, au début des années 80. 4 nouveaux bateaux arriveront au catalogue en 3 ans.

Et le chantier commence très fort, avec le Kelt 7.60. Pour ce voilier de 7 mètres, le chantier Kelt fait appel aux architectes Jean Berret et Olivier Racoupeau, qui ont déjà de nombreuses réussites à leur actif, notamment pour Gib Sea et Bénéteau. Et c’est un pari gagnant. Le Kelt 7.60 est élu « Bateau de l’Année » lors de sa sortie. Et pour cause, c’est un des meilleurs voiliers de 7 mètres, avec le First 25. Près de 500 unités seront produites.

Dès l’année suivante, le chantier sort le Kelt 707, un voilier de 7 mètres transportable. Celui-ci ne rencontrera pas le même succès, malgré des qualités indéniables.

Kelt 707

En 1982, Gilles Le baud souhaite proposer un voilier de 9 mètres, catégorie phare à l’époque. Les feeling 920 et Attalia viennent de sortir et ils sont plébiscités. Comment rester à l’écart de ce marché ?

Le chantier fait appel à Philippe Briand, qui avait déjà dessiné le Kelt 707. Pour répondre parfaitement à la demande, le chantier va diffuser un questionnaire auprès des plaisanciers afin de connaître leur critère du voilier idéal. C’est à l’issue des réponses que sera imaginé le Kelt 9m. Là encore, le bateau passe à côté de son public. 100 exemplaires sont vendus, à comparer aux 900 Attalia et près de 500 feeling 920. On ne détrône pas les gros acteurs comme cela. Mais le bateau reste un très bon bateau, bien construit et plein d’astuces dans les aménagements.

Pour retrouver de la réussite, il faut alors se différencier. L’idée est de revenir aux fondamentaux de la navigation : croisière familiale et échouage réguliers, surtout en Bretagne. Le gros succès va arriver 1 an après, avec le Kelt 8.50. Pour rompre la spirale, le chantier se tourne vers un architecte qui sort du lot. Il s’agit de Gilles Vaton. Le chantier serait-il une histoire de Gilles ? L’architecte va dessiner un des meilleurs voiliers de sa catégorie, innovant et bien conçu. Le chantier va alors sortir un excellent voilier, en dériveur intégral et quillard. Le succès est immédiat pour le Kelt 8.50 avec plus de 600 exemplaires et un titre de « bateau de l’année », en 1983. C’est reparti pour le chantier.

2 ans plus tard, le chantier voit encore plus haut avec un Kelt 39, lui aussi dessiné par Gilles Vaton. Le bateau reprend l’esprit du Kelt 8.50, devenu alors Kelt 29.

La fin d’une histoire

Le chantier va surfer sur son dernier succès pendant 2 ans. Mais voilà, la crise est là. Et de nombreux acteurs ont déjà disparus. Pour faire face à un marché capricieux et une hausse des coûts, il faut être gros. Et Kelt marine ne l’est pas assez. Gilles le baud va donc réfléchir à une vente pour sauver le chantier. De façon assez naturelle, à mon avis, c’est vers le chantier Kirié qu’il va se tourner. Kirié va reprendre le chantier Kelt en 1986. la marque Kelt va être conservée 1 an avant que Kirié lui donne le nom de Feeling. Feeling va garder, en catalogue pendant quelques années, le Kelt 6.20 ( feeling 226), le Kelt 8.50 ( Feeling 29) et le Kelt 39 (Feeling 39).

De son côté, Gilles Le baud repart en région parisienne et retrouve le succès dans l’industrie, mais loin du nautisme. Il y reviendra pour sa retraite et une participation à la Course du Figaro.

Liste des voiliers Kelt :

  • Kelt 5.50, de 1978 à 1982.
  • Kelt 6.20, de 1974 à 1984.
  • Kelt 707, de 1981 à 1987.
  • Kelt 7.60, de 1980 à 1984.
  • Kelt 8, de 1977 à 1980.
  • Keltic ( un proto de course)
  • Kelt 8.50, de 1983 à 1987.
  • kelt 9, de 1983 à 1986.
  • Kelt 39, de 1985 à 1987.

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